Créer un site internet

Partage en famille

Jeudi 9 octobre 2014

Ce matin, nous ne sommes pas pressés n'ayant un "vrai" programme que pour la matinée. Le lever est donc programmé plus tard que d'habitude. Chouette on va pouvoir se reposer ! C'était sans compter sur un "gag" qui s'est produit pour certaines d'entre nous. Dans la maison de Maryvonne, Fatima et Laurie, la nuit a été agitée par la présence d'un rat qui s'est baladé paisiblement et d'un tapis qui, non content de faire chuter l'une d'elles, a en plus amorti le bruit de manière à ne réveiller que le rat !

Pour petit déjeuner, nous nous retrouvons initialement sur des sommiers tressés avant de rejoindre la cuisine à trois. On y regarde Sushila préparer une nouvelle sorte de chapati avec pommes de terre et oignons. Elle nous donne aussi des bouts de bananes de temps à autre, parfois de force, car c'est important pour elle que nous mangions beaucoup. Le propre des gens accueillants qui donnent tout sans compter ...

Après cet épisode, nous partons pour la ville voisine, Nawalgarh, pour y visiter ses havelis. Il s'agit d'habitats traditionnels de riches commerçants qui partaient loin pour les affaires. Ils renvoyaient l'argent à leur famille, chez eux, et cherchaient à afficher leur fortune à travers des habitats somptueux aux murs peints du sol aux sous-toits, à l'intérieur comme à l'extérieur. Les fresques en question représentent la vie quotidienne, des scènes religieuses ou les apports de la colonisation dans les transports comme nous le verrons juste après. Nous nous arrêtons à côté de la première demeure, la seule que nous allons visiter en détail. Autour d'une porte aux dimensions d'un petit arc-de-triomphe et richement décorée, des décors représentant une procession de calèches, une colonne de cavaliers, un couple de divinités salué par quatre éléphants ... Des petites fenêtres sont ménagées dans la façade avec de magnifiques volets en bois. En entrant à l'intérieur de l'habitation, 2 cours : la première était un lieu dévolu au commerce et réservé aux hommes, c'est là que se tenaient les négociations, la 2nde correspond à l'espace familial. Dans cette dernière, on trouve toujours un buisson de basilic, symbole de Lakshmi et de la prospérité. Les femmes ne pouvaient quitter cet espace tant qu'il y avait des hommes étrangers au cercle familial dans la première cour mais elles pouvaient néanmoins observer ce qui se déroulait via des moucharabiehs. Dans leur cour se trouve toute la partie habitation avec les cuisines, les chambres, des salles de réunion à l'air libre mais protégées par des auvents, des points d'eau... Ayant parcouru une cinquantaine de mètres et grimpé deux étages, Jimmy décide de nous accorder un moment de récupération avachi sur les coussins de la salle de négociation.

Haveli - Porte extérieure

1ère cour - Fenêtres et fresques

1ère cour - Des murs au plafond ...

2nde cour - Vue générale et buisson de basilic

2nde cour - Fresque d'une musicienne

2nde cour - Fresque symbolisant Holi et le jet de poudres colorées

2nde cour - Portes donnant sur une cuisine et une chambre

Porte entre les deux cours

Nous sortons de cette habitation qui pouvait héberger jusqu'à 50 personnes et traversons la rue. En franchissant une porte qui ne paye pas de mine, nous nous retrouvons devant d'autres havelis dans une ruelle polluée. Ici, leur état de conservation laisse plus à désirer mais reflète une réalité : aujourd'hui les descendants des riches propriétaires d'antan n'ont plus les moyens d'entretenir ces bâtisses historiques et les laissent donc tomber en ruines. Il n'est pas impossible que dans les prochaines décennies ce pan du patrimoine local sombre dans l'oubli ou entre dans les livres d'histoire. Ca serait dommage ! Sur les murs des 3 bâtisses sur notre droite des représentations d'anglais dans leur quotidien indien, un conquistador portugais et différents moyens de locomotion tels une voiture ou des trains électriques réservés au seul maharadja de l'époque. Voilà des façades originales, je me demande pourquoi cette tradition n'a pas perduré ou ne s'est pas exportée ? Imaginez l'effet que produirait une fresque de Logan ou de Twingo sur votre mur donnant sur la rue !

Fresque des anglais

Train électrique d'un maharadja en bas...

Voiture et conquistador portugais

Autres moyens de locomotion

Le coiffeur

Nous partons alors via quelques rues jusqu'au marché local. Chemin faisant nous passons devant un magasin de drogue mais je ne me souviens plus trop laquelle. Assez étonnant que la vente soit libre ? Un peu plus loin les échoppes et charrettes sont plus conventionnelles : elles proposent des denrées alimentaires, du textile ou des bibelots. Mélange de couleurs sur le bord de la chaussée fréquentée. Les gens acceptent assez facilement de se laisser prendre en photos. Les "petits" métiers sont aussi bien visibles : cireurs de chaussures, coiffeurs dans leurs petits salons qui semblent toujours provisoires ...

Sacs d'épice

Légumes

Stands de fruits

Portrait d'une commerçante

Un salon de coiffure

Après ce petit intermède de temps libre à s'imprégner de la vie locale, nous retournons dans notre famille pour profiter d'elle. Pour commencer, nous donnons un coup de main pour la cuisine. Les filles pluchent concombres et oignons. J'ai enfin le droit d'y prendre part ce qui me fait plaisir car les us et coutumes ne l'autorisent pas trop d'après les renseignements que j'ai pris avant le départ. Ce qui est un peu plus difficile par contre et, ceux qui m'ont déjà lu le savent, c'est cette liaison si spéciale que j'entretiens avec les concombres et qui semble ne jamais vouloir cesser. Mais arrêtez donc de me persécuter ! J'en profite donc pour passer une petite annonce "pigeon voyageur cherche pays sans concombre et sans moustique".

Le déjeuner se passe sans encombre avec parfois quelques saveurs exotiques mais rien de comparable avec hier soir. Fort de mon succès obtenu dans la cuisine, je réussi à enchainer avec la vaisselle. Waouh ! Ca a l'air de beaucoup amuser Sushila qui ne doit pas avoir l'habitude de voir de telles scènes. Par contre, elle joue à fond le jeu et, comme hier soir pour Virginie, je vois de nouveaux plats arriver dès lors que j'ai quasiment fini la pile précédente. Le moment est donc sympa et rigolo !

Après ces tâches du quotidien et alors que la majeure partie du groupe est partie se reposer, Sushila montre à Marie, Virginie et moi les photos de famille lors de mariages. L'album est clinquant, surchargé avec de nombreux effets, un peu comme sur les livres-photos que l'on peut composer soi-même, mais en plus kitsch. Nous voyons les différents costumes que l'assistance change au fil de la cérémonie, la dot, les danses, la caravane de chameaux ou le marié sur son cheval blanc ... Quel moment de partage agréable autour d'instants forts pour eux. Du coup, nous allons aussi chercher nos photos de proches et de paysages.

Un peu plus tard, le plus grand fils de la famille, Rajveer, me propose d'aller en ville avec lui. J'accepte et nous partons sur les chapeaux de roue. Il conduit si vite que je crains de croiser une vache -ou pire un passant !- à la sortie des virages.  Par contre, son usage du klaxon est excellent et très à propos : tout le temps. Comme il est jeune, je m'enquiers de son âge. Il vient d'avoir le permis me répond-t-il sans blaguer. Très rassurant ! Du coup, je demande qui est le propriétaire du véhicule ? Apparemment ce sont ses parents, je ne pense donc pas qu'il le crashera et décide de rester à bord au moins 2 ou 3 km supplémentaires. Au village, il se gare devant un magasin où il se procure un cahier de type carnet de coloriage Winnie l'Ourson et deux tubes de henné. Nous pouvons rentrer dans la famille. Toujours à 100 à l'heure. Je me sens partie intégrante de la voiture : quand il desserre le frein à main je serre les fesses et vice-versa. Un moyen de brûler les calories des chapatis...

De retour, nous nous attelons à rabattre et harnacher les chevaux pour une petite session équestre. Pendant ce temps, les filles équeutent des haricots verts. Lorsque les chevaux ont été rameutés et l'un d'eux préparé, l'ensemble du groupe se reforme à proximité pour un petit tour ... du champ. Le cheval sellé, Moobal, est pépère et suis Rajveer comme une ombre. Moi qui était prêt pour la séance de rodéo à la kirghize ... Nous tournons volontaire après volontaire. Pour l'une de nous c'est même un moment particulier, malgré la docilité de l'animal. Alors content pour toi que tu aies eu cette opportunité.

A cheval sur Moobal

A cheval sur Moobal

A cheval sur Moobal

A cheval sur Moobal

A cheval sur Moobal

Après cette pause sportive de haut vol, moins risquée qu'un tour de manège, nous partons à travers champs pour aller admirer le coucher de soleil. Chemin faisant, nous découvrons à nos dépens une variété teigneuse de la flore locale qui va régulièrement nous attaquer durant le séjour : il s'agit d'une plante qui, à votre passage, libère des petites fleurs sèches très épineuses et coriaces qui s'accrochent furieusement au moindre vêtement. Comme nous sommes en sandales ou tongs et pantalons ou sarouels légers, c'est du pain béni pour le bombardement massif et les agressions de votre peau. Et le seul moyen de les enlever, c'est de se piquer les doigts. Autre point qui contribue à faire de ce sentier un parcours du combattant : les fourmis. Si nous tentons d'adopter les coutumes locales, il existe une religion que nous découvrirons un peu plus loin où il est interdit de tuer un être vivant. Mais sur la piste que nous suivons les fourmis sont si nombreuses qu'on ne peut éviter d'en faire de la compote. Nous aboutissons au final à une légère proéminence du terrain entourée de cultures de millet et de haricots principalement. En guise de monument sur cette colline, deux panneaux solaire. Dans les environs quelques paysans travaillant dans les champs au loin et un petit temple partagé entre diverses familles pour les rites.

En rentrant à la maison, nous pouvons déguster un petit thé indien avant de nous séparer un moment. Virginie et Marie vont voir Sushila traire les animaux avant de se faire décorer les mains au henné et de commencer la cuisine. Le reste du groupe se repose tranquillement. Quant à moi, les enfants viennent me chercher pour que l'on fasse tous ensemble les devoirs. Nous filons dans leur chambre du moment : un lit matrimonial pour 4 ! Je sors mes stylos de couleurs et leur prêtent. Ils s'en emparent avec bonheur et se les échangent parfois. Rajveer, le plus grand a un exposé à préparer avec pour écrin le journal de Winnie que l'on s'est procuré tout à l'heure; Pintu de 4 ans son cadet attaque de la physique, à un niveau plus élevé que celui que j'ai jamais atteint; Niki est dans les maths et Chintu le plus jeune se concentre sur un atelier d'écriture. Nous plaisantons aussi de temps à autre entre deux exercices. Rajveer me confie aussi une mission : celle de décorer la page de garde de son exposé par des dessins. S'il avait su que j'étais un mix entre Picasso et Kandinsky, il aurait peut-être fait appel à un autre que moi pour l'illustration parce que s'il se tape un 0 pointé du fait de mes gribouillis de môme de 5 ans, je me sentirai légèrement responsable tout de même... Les autres enfants m'interrompent régulièrement  pour me montrer leurs cahiers en anglais (et non en hindi). Mais je ne peux éviter la décoration de cette première page. Je commence modeste par la seule chose que je sais dessiner : une fleur. Toute petite, dans un coin, au format d'un timbre. C'est bon mission remplie ? Mais non Rajveer en veut un second plus grand. Ok on va tenter la maison alors... Pas de piscine, de balcon ou autre fioriture, pas de cheminée car le Père Noël est une ordure paraît-il. Non : une maison simple, de mineur du Nord-Pas-de-Calais, avec juste une façade et deux fenêtres, pas de briquettes rouges qui donnent tout leur caractère à ces belles habitations (je ne maîtrise pas encore bien le rectangle...), pas d'escalier jusqu'à la porte (trop compliqué !). Au final, l'espèce de paquet cadeau ressemble (un peu) à une maison. Il va être heureux le Rajveer que je pense un instant. Mais non, il faut encore en faire, parce qu'il faut couvrir toute la page ! Un peu comme s'il fallait reprendre encore et encore le pudding à la gelée rose de votre belle-maman. Là c'est un effort au moins comparable que l'on me demande. Je pars donc dans les formes géométriques et après une réflexion entame un triskel qui va me prendre la moitié de l'espace restant, ce sera toujours ça de gagné ! Une coupure de courant vient temporairement me sauver la mise. Nous passons de la chambre à la salle à manger où les devoirs continuent un court moment à la frontale jusqu'au retour de la lumière. Je peux donc achever la seule oeuvre d'art que j'aurai laissée à la postérité de mon vivant. Quelle chance ! Une fois terminée, Rajveer me sollicite cette fois sur le contenu de son exposé qu'il a repris directement sur un site de partage de connaissances.

Après l'effort, le réconfort. Niki, Chintu et Pintu jouent à des jeux vidéo pendant une dizaine de minutes et me mettent régulièrement la tablette entre les mains pour que j'y prenne part. Selon les tentatives je les impressionne avant de tomber de mon piédestal pour devenir un looser qui les dépite. Nous passons pour finir à une activité dans le jardin : il s'agit d'un jeu indien à mi-chemin entre un simulacre de lutte et chat perché. Avec la chaleur ambiante, je suis entre la cocotte-minute et le volcan au bord de l'éruption. Capitulant, nous rejoignons la cuisine où Virginie, Marie, Maric, Sushila et Niki arrivée il y a tout juste quelques instants dansent. Je n'y prends pas part pour ne pas abaisser le niveau ...

Pour le repas, le dernier sur place, toute la famille est présente. Mais cette fois, c'est Kan, le père, qui mange avec nous. Après le diner, le groupe se disperse. Avec Marie et Virginie, nous restons encore un petit moment pour discuter avec eux et faire nos adieux aux enfants qui, demain, à notre réveil, seront déjà sur le chemin de l'école. Je suis touché parce que c'est avec eux que j'aurai passé le plus de temps depuis leur venue dans ma jophra hier. Avec toutes ces activités partagées et cette émotion permanente, nous serions volontiers restés ici quelques jours de plus ...

Ajouter un commentaire
 

Créer un site internet avec e-monsite - Signaler un contenu illicite sur ce site